Le 5 fevrier, ce sera du rire, quelques verres, Ti-punch parce que le vin est dégueulasse, un, deux, trois, des toasts, au voyage, quelques mises en garde, conseils, quelques mots tendres, des gestes, un lendemain silencieux, retenu, de l'angoisse sûrement, qu'est-ce qui m'a pris d'entreprendre un projet pareil? toute seule? Une nuit blanche, c'est sûr, regarder l'autre qui ne nous accompagnera pas, qui ne dort pas lui non plus, et puis déjà l'aéroport, vérifier pour la centieme fois les billets, passeport, adresses, carnets, lotion contre les moustiques, adresse, passeport, billets, heure, l'avion me rend aussi docile qu'un enfant, je suivrai les ordres, papiers, qu'est-ce que je fous là?, un au revoir qui s'étale sur des heures, des larmes peut-être, surement apres, toute seule dans la salle d'embarquement, battements de coeur, respirer, ça ne sert à rien, revenir au présent, à cette salle, les gens autour, laisser le passé s'égrener, ne pas anticiper, où dormir, bus ou taxi, on pensera aux autres voyages plutôt, à sa vie, aux choix, aux espoirs sur lesquels se fondent ce projet, aux personnages qui s'esquissent dans l'ombre, à ne pas avoir peur, qu'on est rien, ou rien d'individuel, relié au tout comme ils disent et que je ne les écoute que lorsque le moteur de l'avion me broie le coeur, je vais mourir, oui, mais c'est pas grave, combat contre une phobie qui ne veut pas disparaitre, 17 heures, on arrive, après une escale a Toronto, a l'aéroport d'Aruba. Sortir la dernière. J'ai trois mois devant moi. Se laisser guider par le flot humain jusqu'aux bagages. Espérer que son sac de survie a suivi. Le trouver. Douanes en anglais ça y est, le début du voyage. On expliquera qu'on est touriste, où on va dormir, quand on repart. On sort, chaleur, bruit, la nuit bientôt va tomber. Chercher un distributeur, besoin d'argent local. Si j'en trouve, je prends le bus. Sinon mes dollars US me serviront à payer le taxi jusqu'à l'hotel. L'hotel justement. Loin de tout. Coin glauque. Vide. Peut-être pas. Dimanche, je me réveille, tôt. Le coeur serré. Le premier jour, je ne vais pas savoir ce que je fous là. J'aurai peur. Des regards. Des rues. De mes choix. J'irai à la plage. Pas longtemps. Le soleil va me tuer. Toucher l'eau. Manger un je-ne-sais quoi à emporter. Boire un coke dans un café, sûrement de touristes. Je rentre tôt. Fatiguée. Me couche. Me réveille. Tôt. Pars visiter la ville. Musées, rue piétonne, quais. Une bonne petite touriste bien sage qui fait ce que le guide lui recommande. Normal, ne pas être dure avec soi, laisser la confiance chercher son terrain. Tatonner. Mardi, plage. On se sent mieux déjà, sauf si le soleil a profité d'un moment d'innatention la veille. Sauf si une mauvaise rencontre a miné le terrain. Les gens sont souriants. Moi aussi. Je lis un bouquin d'enseignement zen. je fais mon yoga chaque matin. Mercredi, à peine le temps de parler aux gens, je repars a l'aeroport, en bus évidemment. Tôt le matin pour échapper à la chaleur. Enregistrement des bagages. Air conditionné, echarpe autour du cou, petit avion, une heure de vol, paysage incroyable vu d'en haut, atterrissage haut en couleur, et je suis à Curacao, comme l'alcool dont je me priverai surement pas même si l'écorce d'orange... Une auberge de jeunesse dans Otrabanda ("l'autre coté" en Papiamento). Quartier populaire, local, quelques junkis, des dealers, une architecture hollandaise, des blancs, des noirs, des indiens, qui ne se mélangent pas entre eux? Le lendemain, une rencontre avec Gaetan peut-être, Couchsurfer contacté sur le net, et français d'origine, peut-être avec cette femme qui vient juste de me contacter mais qui ne m'a pas donné assez de références sur elle pour que je la rejoigne en toute confiance... Selon l'humeur, rester 2 jours ou 4, observer, réserver son vol pour Grenada et un hotel pour la premiere nuit... Aéroport encore, bagages enregistrés, cette fois, ça va durer toute la journée, avec une escale à Trinidad, douane, que j'ai choisi de ne pas voir. Un bon moment pour observer, les aéroports, les gens. et puis Grenada, douane encore, recherche du sac sur le tapis, ça y est, petite île paradisiaque, je voudrais en faire le tour, mais aurais-je le temps? Le 19, je suis à Carriacou, plus petite encore. Puis Union Islands, et Béquia, en passant par Mayreau, la Petite Martinique, Tobbaco Cayes pour la journée, ça va être incroyable toutes ces petites îles, leur différence, de les traverser de long en large à pied, le bateau continuellement, des douanes, qui tracent un territoire qui n'a rien à voir avec les frontières géographiques, des cafés sur le port, quelques nausées, des rencontres, là c'est sûr. Le sac à dos est de moins en moins lourd. Parce qu'il se vide, mais aussi parce que le corps se renforce, s'habitue à la chaleur, au poids. L'air de la mer, baignades quotidiennes, écriture sur les carnets, sur l'ordi, lire, lire, lire, écouter... St-Vincent, c'est le 2 mars. Étape importante, il faudra prévenir Elvis quelques jours à l'avance de mon heure d'arrivée au port, une camionette me prendra je l'espère, m'emmènera au centre d'hebergement de l'ONG. Pour une semaine. Dans les terres. Avec des gens qui viennent du monde entier. Et un Françcais parait-il. Du trekking est prévu. Elvis me montre quelques trucs. Le village le plus proche. Les bus. La chambre n'a pas de fenetres. On partage 4 toilettes à 60. Je cherche une essence qui puisse résumer le monde de la coopération internationale... Tous les matins, j'écris. Le soir, c'est bouffe populaire, et quelques verres à l'abri des moustiques malgré notre besoin d'air, des discussions que je suis de loin car je ne participe pas directement à la formation donnée ici. Puis, c'est dimanche, on replie les bagages, putain une semaine sans bouger, c'était bon, faire une bonne nuit parce qu'il faudra surement marcher jusqu'au village avec le sac demain, trouver un bus, s'il passe. Arriver à Kingstown, le bruit, les embouteillages, la pollution, trouver le bus pour partir dans l'est de l'ile rejoindre une autre CS qui tient un hotel près de la mer. Détente, plage, marches. Le 12, on repart pour Kingstown. L'aeroport cette fois. Il n'y a pas de bateaux entre St-Vincent et Ste-Lucie. Retrouvailles avec la LIAT (Air Caraibes) Re-re-re enregistrement de bagages. re-re-re attente et observation des gens dans l'aéroport. Où vont-ils? Font-ils des voyages fréquents entre iles? Et à chaque fois, douane, passeport, adresse d'un hotel, date de départ, nouvelle monnaie, peut-être Michael, autre CS, viendra-t-il me chercher. Peut-être pas. Irais-je chez lui? Je crois. A moins que... On arrive. Présentations. Gène qui devrait vite céder. Ou pas. Recit du voyage. Qu'est-ce que tu veux faire ici? Liste de choses à voir. Plages du sud. Volcan. Montagne. Pas de voiture. Des bus. Si j'ai confiance, je laisserai mes affaires là pour partir quelques jours dans le nord. Sinon... Ce sera bref Ste-Lucie, à peine une semaine, car il reste encore la Martinique, Dominique et la Guadeloupe, avec ses iles autour, et juste un mois avant d'arriver à Cuba. Passage encore flou. Il y aura cette amie d'amie qui m'accueillera à Fort-de-France, des promenades matinales dans un marché engorgé, beaucoup de bruits et du monde partout qui me bousculera après ce mois passé dans les Grenadines. Mais on y parlera français (et créole) et ce sera bon de ne plus faire d'effort. Vraiment bon. Peut-être sacrifierais-je la Dominique pour pouvoir faire le tour des deux iles francaises. Peut-être la Martinique me rejettera au premier coup d'oeil. Peut-être arriverais-je en Guadeloupe juste la veille de mon vol pour Cuba, fixé d'avances au samedi 11 avril depuis l'aeroport de Pointe-à-Pitre. À moins que Castro soit mort, que l'ile s'embrase, que la Guadeloupe soit à sang... Sinon, aeroport de Pointe a pitre. Attente, enregistrement, attente encore. Vol de 4 heures quand-même. Air caraibes toujours. A l'arrivée, une carte de touriste a montrer, passeport, douane. Plus de francais, plus d'anglais. Va falloir se démerder avec ses quelques mots d'espagnol appris tant bien que mal les jours de paresse ou pendant les heures d'attente dans des aéroports justement... Expliquer que je suis une touriste, vider ses bagages, justifier les médicaments, les ordonnances qui sont écrites en francais, sortir la carte de la Casa particular... Et là, peut-être, y retrouver un peu de la vie d'ici. Perdre sa solitude, avec l'être aimé qui passe par là voir comment ça se vit un cinquentenaire de révolution castriste, me voir moi, après presque trois mois de séparation, et 14 îles... Il y aura des émotions, des récits, l'impression de ne pas être comprise, que tout ça est perdu en moi, impossible à partager, des ajustements, mais le bonheur d'en être arrivée là, seule, et de le retrouver, enfin, et d'envisager l'avenir totalement autrement. Il faudra se séparer encore une fois, quelques jours, c'est rien. Mais là, il y en aura des larmes, trop c 'est trop, et puis on pleurera d'avances de la séparation prochaine d'avec ces îles, cette vie au présent, cette solitude... La Havane, aéroport, douanes, quelques souvenirs a déclarer, une bouteille de rhum... Enregistrement des bagages, une familiarité qui me fera sourire, l'attente, l'avion, énorme, Air Canada, Waoua, peut-être le calme, la peur vaincue, du moteur et des ailes de métal, 4 heures et quelques, une escale à Toronto qui n'en pourra plus de s'éterniser tant on a hate de poser son sac dans le salon. De prendre une douche. De mettre autre chose sur le dos que les 5 T-shirt qu'on trimballe depuis 3 mois. De voir les têtes amies qu'on aura l'impression de ne jamais avoir quittées après quelques jours. De retrouver son amoureux.
C'est tout ce que je peux imaginer de mon voyage à deux semaines du départ...
Je l'ai écris d'une traite, je ne corrige pas, le relirais au retour.
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