Les Antilles sont un monde hétérogène, fragmenté, "comme une mosaïque dont les constituants ont été maintenus séparés les uns des autres, rceevant chacun le flux exclusif et lointain des métropoles européennes. Les modes de vie imposés, les langues différentes, les religions et les mythes importés, et même les peurs inventées par les Européens puis par les grands voisins du Nord, ont éloigné cette trentaine de peuples les uns des autres."
Alejo Carpentier, Le Siècle des lumières, p. 17.
Dans les Petites Antilles, il est rare que l'on ne puisse pas voir la pointe d'une île voisine à l'oeil nu. Ste-Lucie depuis le nord de St-Vincent. Carriacou depuis Grenade, et Union Island depuis Carriacou. La Dominique depuis la Martinique. Ensuite, les terres et la distance qui les sépare grossissent, et l'on oublie même qu'on est sur un pays retenu à rien une fois rendu à Cuba.
Il y a les îles qui chassent les hommes sur leurs voisines pour qu'ils reviennent les poches chargées d'argent. La plupart du temps, les insulaires n'ont d'yeux que pour la métropole, les États-Unis, l'Angleterre. Ils n'ont jamais mis les pieds sur les îles mitoyennes, qu'ils estiment toujours plus sauvage et plus pauvre que la leur.
Pourtant, malgré les différences de langue et de culture, les îles partagent le même désir de se débarasser de "l'intrus". Et les mêmes montagnes, qui ont toujours été l'espace de la liberté. À Cuba, terreau de la révolution castriste, la Sierra Maestra. En Martinique, refuge du marronage. La resistance grossit dans les montagnes. Le littoral, c'est pour les blancs, en espérant qu'on les jette plus vite à la mer comme ça.
La mer, dans les Caraïbes, on s'en tient loin. Les marins sont ceux qui la tremblent le plus. Elle est une frontière bien plus qu'une interface. C'est ce qui explique qu'on la franchisse bien plus souvent par les airs que par l'eau.
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