Théoricien à sa façon, il écrit des poèmes sur toutes les villes du monde sans jamais être sorti de Trinidad. Il connait le nom de la rivière qui traverse Grenoble et l'histoire de Jacques Cartier. Il voit le monde à travers les yeux des touristes dont il porte les valises. Mais il y a aussi tous ces vieux livres, de géographie et d'histoire.
C'est un intelletuel de la vie lointaine et un homme manuel dans le quotidien. Il sait construire une maison, mais toutes les rivieres, montagnes, tous les paysages, hommes célèbres, guerres sanglantes ne sont à ses yeux que des matériaux abstraits. Il ne dénonce pas un régime, il prône une façon de vivre. D'ailleurs, il ne veut pas publier. Car à Cuba, publier, c'est faire de la politique. Il voyage immobile, en puisant dans ses rencontres les quelques mots et images dont il a besoin pour faire rouler son imagination.
Il écrira un décasyllabe pour nous. Et sur mon carnet, ces deux citations de Thoreau qu'il connait par coeur:
"No es mas rico quien mas tiene.
Sino quien meno necessita"
"La moderna esclavitud no necesita grilletes
"La moderna esclavitud no necesita grilletes
con milliones de billetes esclaviza la virtud"
Il ne croit pas à la liberté politique. Il est bien libre lui, en pleine dictature. Libéré des besoins superflux qui nous asservissent. Mais la liberté sert-elle vraiment si l'on ne peut y parler que de la beauté des vallées d'un pays qu'on n'a jamais vu ailleurs que sur une photo en noir et blanc d'un vieux livre dont plus personne ne veut?
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